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European elections : disappointment in France, but a step forward for Europe

In France, the outcome of the European elections has certainly given little cause for satisfaction in our ranks. The turnout was very low. As the opposition had hoped, the ‘punishment’ vote we saw in the regional elections was repeated, even if the advance of the left has been halted.

Within the majority, the UDF has managed to rally the equivalent of half the UMP votes. Yet the UMP managed to increase the number of its MEPs in Strasbourg (17 against 12 RPR and DL in 1999), at a time when the quota allocated to France has fallen to make room for the new Member States (78 French MEPs instead of 87). There are finally signs of a fall in the eurosceptic vote, on both the right and the left.

We are not so blinkered as to rejoice at the way the socialists and the UDF immediately spoiled their electoral victory. Although they now form the largest national delegation within the PES Group, thanks to their sectarianism, French Socialist Party MEPs performed the amazing feat of turning their colleagues against them to the point that they actually handed over the presidency of Parliament to a Spaniard and the chair of the Group to a German. As for our UDF partners, they could not find anything better to do than leave the EPP Group at the very time that Group had won the day with regard to the draft Constitution and confirmed its position as the dominant group in the newly elected Parliament! The political result is that, if the UDF had stayed, French MEPs would have been in second place within the EPP Group, just behind the Germans, whereas they are now in sixth place, behind the English, Spaniards, Italians and even Poles. Meanwhile, the UDF sits in a small and diverse group, next to passionate supporters of Turkey’s application and total opponents of public services à la française. It beggars belief…

Fortunately, these national disappointments are offset by a far more encouraging outlook for the European Union as a whole.

Firstly, although the left has won in France, the right and centre right are broadly in the majority in Europe. And the very isolation of the French Socialist Party within the PES Group confirms that our compatriots are the only ones still entrenched in a Marxist, archaic vision of the way the economy and society work. The reforms that Gerhard Schroeder is courageously undertaking in Germany with a left-wing majority – and the support of the CDU when national interests are at stake – are the same as those that Jean-Pierre Raffarin is trying to introduce in France.

Secondly, in this summer of 2004, the impetus given by the European Convention is still being maintained.

Thanks to its very well-oiled machinery, Parliament has managed to absorb, both practically and politically, in the space of a few days and with no opposition, 732 MEPs from the enlarged Europe, hailing from 25 countries, affiliated to… 162 national political parties and now working in 20 languages within seven parliamentary groups. It took just four sittings to elect the President and the Bureau of Parliament, together with the 20 chairmen and 60 vice-chairmen of parliamentary committees!

For its part, given the outcome of the elections, the European Council has managed to confirm its assent to the draft Constitution. Despite the breakthrough of small eurosceptic parties in the United Kingdom and some Central European countries, a very large majority of the new Parliament is in favour of the European Union.

Lastly, these results also gave the winning party, the EPP, the courage to impose a candidate from its ranks as President of the European Commission, which means we can anticipate that the Constitution will be applied in a key area. Hitherto the President of the Commission, appointed solely by the European Council, following an almost automatic vote of confirmation by Parliament, had no more legitimacy than a top international civil servant. José-Manuel Durão-Barroso now has democratic legitimacy because he was chosen by the direct decision of the MEPs whom European citizens had just elected. Prior even to the application of the Constitution, Europe has taken a genuine democratic leap forward. Even if the turnout was not very high, those who took the trouble to vote on 13 June have reason to rejoice because however they voted that day, they did a good turn for all the citizens of Europe.

Alain Lamassoure, 26 July 2004

Elections européennes : malgré la déception en France, l’Europe franchit un nouveau pas

Certes, en France, pour nos couleurs, le résultat des élections européennes comporte peu de sujets de satisfactions. La participation électorale a été particulièrement médiocre. Comme l’espérait l’opposition, le « vote-sanction » des régionales s’est reproduit, même si un coup d’arrêt a été donné à la progression de la gauche.

Au sein de la majorité, l’UDF a réussi à rassembler l’équivalent de la moitié des voix de l’UMP. Celle-ci réussit toutefois à accroître le nombre de ses élus à Strasbourg (17 contre 12 RPR et DL en 1999), alors que le contingent alloué à la France a diminué pour faire de la place aux nouveaux Etats membres (78 députés français contre 87). On observe enfin un recul du vote eurosceptique, tant à droite qu’à gauche.

L’esprit partisan ne nous aveugle pas au point de nous réjouir de la manière dont socialistes et UDF ont immédiatement gâché leur victoire électorale. Alors qu’ils forment désormais la délégation nationale la plus nombreuse au sein du groupe socialiste, les eurodéputés du P.S. ont réussi, par leur sectarisme, le tour de force de se mettre à dos leurs collègues au point d’abandonner la présidence du Parlement à un Espagnol et celle du groupe à un Allemand. Quant à nos partenaires de l’UDF, ils n’ont rien trouvé de mieux que de quitter le groupe PPE, alors même que celui-ci venait de voir triompher ses idées avec le projet de Constitution, et de confirmer sa position de groupe dominant du Parlement réélu! Résultat politique: alors qu’avec l’UDF, les Français auraient occupé la deuxième position au sein du groupe PPE, juste derrière les Allemands, ils se retrouvent au sixième rang, derrière les Anglais, les Espagnols, les Italiens et même les Polonais. Tandis que les UDF siègent désormais dans un petit groupe hétérogène, auprès de défenseurs passionnés de la candidature turque et de contempteurs patentés du service public à la française. Comprenne qui pourra…

Ces mécomptes nationaux sont heureusement compensés par un panorama beaucoup plus encourageant à l’échelle de l’Union européenne tout entière.

D’abord, si la gauche a gagné en France, la droite et le centre-droit restent largement majoritaires au niveau européen. Et l’isolement même du P.S. français au sein du groupe socialiste confirme que nos compatriotes sont les seuls à rester attachés à une vision marxiste, archaïque, du fonctionnement de l’économie et de la société. Les réformes que Gerhard Schröder mène courageusement en Allemagne avec une majorité de gauche – et le concours de la CDU quand l’intérêt national est en jeu – sont les mêmes que celles que conduit Jean-Pierre Raffarin chez nous.

Ensuite, en cet été 2004, l’élan donné par la Convention européenne est toujours en marche.

La machinerie, décidément bien huilée, du Parlement a été capable, techniquement et politiquement, d’absorber en quelques jours sans coup férir les 732 députés de la grande Europe, issus de 25 pays, affiliés à … 162 partis politiques nationaux et travaillant désormais en 20 langues au sein de 7 groupes parlementaires: 4 jours de session ont suffi pour faire élire le Président et le Bureau du Parlement, comme les 20 Présidents et 60 Vice-Présidents des Commissions parlementaires !

De son côté, au vu du résultat des élections, le Conseil européen a pu confirmer son accord sur le projet de Constitution: en dépit de la percée de petits partis eurosceptiques au Royaume-Uni et dans certains pays d’Europe centrale, une très forte majorité du nouveau Parlement est favorable à l’Europe communautaire.
Enfin, les mêmes résultats ont donné l’audace au parti vainqueur, le PPE, d’imposer un candidat issu de ses rangs pour présider la Commission européenne, obtenant ainsi l’anticipation de l’application de la Constitution sur un point-clef. Nommé par le seul Conseil européen, après un simple vote de confirmation, quasi-automatique, du Parlement, le Président de la Commission n’avait jusqu’ici que la légitimité d’un super haut-fonctionnaire international. José-Manuel Durao-Barroso a désormais une légitimité démocratique, puisque son choix est issu de la volonté directe de ceux que les citoyens européens venaient d’élire. Avant même l’application de la Constitution, l’Europe vient de franchir un véritable bond démocratique. Même s’ils n’étaient pas très nombreux, ceux qui se sont déplacés pour voter le 13 juin ont matière à se réjouir, quel qu’ait été le sens de leur vote: ce jour-là, ils ont fait gagner tous les citoyens d’Europe.

Alain Lamassoure, le 26 juillet 2004.

Election du Président de la Commission européenne (22/07/04)

Référendum sur la Consitution européenne (14/07/04)

Pacte de stabilité (13/07/04)

Pour gagner le référendum

Le ralliement de Jacques Chirac à l’option du référendum pour la ratification de la Constitution européenne n’aura pas surpris les lecteurs de cette rubrique. Voilà deux ans que, non seulement je milite pour le recours à la procédure la plus démocratique, mais que je ne cesse de prédire qu’il est politiquement impossible de l’éviter.

Jusqu’à présent, l’Union européenne reposait sur des traités, négociés par des diplomates et liant des gouvernements. Au contraire, la Constitution a été conçue par des élus des peuples, pour unir les citoyens eux-mêmes et pas simplement leurs dirigeants. Cette mutation démocratique exige l’accord explicite des citoyens. Tony Blair et Jacques Chirac doivent être félicités pour le courage dont ils font preuve en prenant ce risque politique qui est à la hauteur de l’enjeu.

Car le risque n’est pas mince. Le référendum est une technique très délicate qui, selon son emploi, peut être la voie la plus démocratique ou la plus ambiguë. A vrai dire, seuls les Suisses, et certains Etats américains comme la Californie, ont une pratique suffisamment longue pour en maîtriser l’usage : ce qui ne signifie pas que le « oui » l’emporte systématiquement (40% des référendums suisses aboutissent à un « non »), mais au moins les citoyens vont aux urnes pour se prononcer sur la question posée. Aucun des 25 Etats de l’Union européenne n’a une telle expérience. Les référendums y sont rares, voire exceptionnels, et les électeurs saisissent l’occasion pour exprimer leur mécontentement du moment, parfois sans rapport direct avec le sujet. En France, la tradition gaullienne leur a même conféré un caractère plébiscitaire avoué : le référendum y est d’abord une question de confiance posée par le Président au peuple français qui l’a élu. En 1969, le général de Gaulle a constaté qu’il n’avait plus cette confiance, et il en a tiré toutes les conséquences en démissionnant aussitôt. En 1992, au vu des sondages initiaux, très favorables, François Mitterrand a clairement cherché, sur le projet populaire de monnaie européenne, l’occasion de retrouver l’autorité politique qu’il avait perdue sur la scène intérieure : sur les 49% des Français qui ont voté « non » au traité de Maastricht, un gros tiers au moins étaient des électeurs de droite plutôt favorables à l’union monétaire mais désireux de saisir cette occasion inespérée pour en finir avec un Président qu’ils n’aimaient pas.

Le même phénomène risque évidemment de ce reproduire en 2005, de la part, cette fois, des électeurs de gauche – voire de certains électeurs du centre ou de la droite qui, comme en 1969, utiliseront ce moyen pour hâter une succession qu’ils appellent de leurs vœux au sein même de la majorité du moment. Et le même risque existe dans la plupart des autres pays.

Placés dans la même situation politique, tous les gouvernemnts auraient un immense intérêt à se mettre d’accord sur une stratégie commune de ratification.
La meilleure façon de déconnecter enjeu institutionnel européen et enjeu de pouvoir national serait d’organiser un référendum dans les 25 pays le même jour. Animés par l’euro-sceptique danois Hans-Peter Bonde et par moi-même, un groupe d’une centaine de Conventionnels a milité dès le printemps 2003 pour cette solution, la plus démocratique et la plus européenne. On nous a objecté que le référendum n’existait pas dans tous les pays. L’argument ne vaut pas grand’chose : partout, une loi simple suffit pour organiser un référendum d’effet consultatif, sachant évidemment qu’aucun gouvernement ne pourrait passer outre au résultat d’un tel vote populaire ; au demeurant, des pays sans procédure constitutionnelle, ni tradition référendaire, tels que le Luxembourg ou les Pays-Bas ont annoncé leur intention de donner l’exemple en la matière.

A défaut de cette solution « idéale », la mise au point commune du calendrier global serait absolument nécessaire. Les nouveaux membres de l’Union ont, ici, un rôle important à jouer : ils ont su, eux, avoir une vraie stratégie commune pour la ratification du traité de leur adhésion à l’Union, il y a un an. En commençant par faire se prononcer ceux d’entre eux qui étaient les plus favorables pour créer une dynamique positive. Un calendrier de même type, amélioré par le choix d’une date commune de référendum au moins pour un groupe de pays, pourrait créer des conditions propices.

Une autre idée simple, mais de grande portée, consisterait à ce que les Etats recourant au vote populaire s’accordassent sur les termes de la question à poser, voire sur son exposé des motifs.

Troisième recommandation : le débat sur les frontières de l’Union doit être clairement tranché. Le peuple français, pour ne parler que de lui, rejetterait sans hésiter la perspective d’une Europe politique dont il ne maîtriserait, ni l’identité, ni les frontières. Compte tenu des engagements bien imprudents pris envers la Turquie, le seul moyen de rassurer nos compatriotes sur ce sujet essentiel est de s’engager clairement à ce que toute nouvelle adhésion qui susciterait des réserves politiques soit subordonnée à un nouveau référendum dans notre pays.
Enfin, dans le cas français, la procédure même peut jouer un rôle important pour garantir l’esprit d’un référendum européen plutôt que d’un plébiscite national.

Les deux articles de la Constitution de la Ve République relatifs à l’usage du référendum (les articles 11 et 89) offrent chacun le choix de deux options possibles : le référendum relève toujours d’une décision du Président de la République, mais l’initiative peut venir, soit du gouvernement, soit du Parlement. Jusqu’à présent, les Présidents ont priviélégié l’initiative gouvernementale, qui leur permettait de maximiser l’impact du « oui » espéré au bénéfice politique de l’exécutif. Cette fois, la sincérité du vote et l’intérêt de la cause européenne recommandent catégoriquement de recourir à l’initiative parlementaire. Le fait que le Président de la République ait annoncé sa décision de principe le 14 juillet ne préjuge en rien la procédure qui suivra. Au demeurant, le Président peut se prévaloir du résultat des consultations auxquelles il avait procédé au printemps dernier : à ma connaissance, tous les chefs de parti avaient alors pris position en faveur du recours au référendum – lequel d’entre eux pourrait-il ensuite refuser d’apposer sa signature pour lancement de la procédure ? Naturellement, cela n’empêchera aucun de ces responsables de faire éventuellement campagne pour le « non », mais l’enjeu européen et le sort du pouvoir exécutif seront d’autant plus déconnectés que cette procédure fera l’effet d’une « première » politique dans l’histoire de la Ve République.
Plus il sera clair que l’enjeu du choix est l’avenir de l’Europe, plus le « oui » aura de chances de l’emporter : tous les sondages, comme les élections récentes, montrent qu’au moins deux Français sur trois soutiennent le projet européen. Au contraire, plus le débat sera ramené à un enjeu de pouvoir national, plus les électeurs seront tentés par le « non » : aux élections du printemps dernier une majorité de Français a tenu à sanctionner le gouvernement au pouvoir. Et ce phénomène s’est produit au même moment chez la quasi-totalité de nos partenaires. Le référendum sur l’Europe sera gagné, le plébiscite serait perdu.

Alain Lamassoure, le 7 septembre 2004.