Mon interview dans Le Figaro de ce jour : L’Europe s’use quand on ne s’en sert pas »

LE FIGARO. – Dix ans après l’échec du référendum de 2005, l’Europe est toujours plus mal supportée par les Français. Est-ce définitif ?
Alain LAMASSOURE. – La crise, dont la France est le dernier pays à sortir, a eu un effet contradictoire. D’un côté, les gouvernements et les opinions publiques ont eu le réflexe de se replier sur eux-mêmes, en blâmant le monde extérieur. De l’autre, les gran…ds évènements du monde font voir avec évidence que seule l’union des nations au niveau européen est efficace : flux massifs de migrants, incendies islamistes au Moyen-Orient et au Sahel, guerre en Ukraine, défi de l’économie numérique, union énergétique, négociations sur les règles du jeu commerciales et financières avec les USA ou la Chine, lutte contre la concurrence fiscale déloyale pratiquée à l’intérieur même de l’Europe : autant de sujets sur lesquels même les plus europhobes admettent que la première clé est d’abord au niveau européen.

Les 62 % qui voteraient non sont-ils pour autant partisans d’une sortie de l’Union européenne ?
Ils comprennent bien sûr des eurosceptiques, mais aussi beaucoup de citoyens impatients de la lenteur de l’action des décideurs européens. L’Europe s’use quand on ne s’en sert pas là où elle est indispensable.

N’avez-vous pas le sentiment d’un délitement général, quand l’Angleterre envisage de quitter l’UE ?
Ne nous laissons pas impressionner par David Cameron ! Il a largement gagné, mais son parti a été écrasé en Écosse. Compte tenu de l’opposition frontale des Anglais et des Écossais sur l’Union européenne, le premier ministre britannique a plus à perdre qu’à gagner en laissant apparaître la profondeur de la division sur ce sujet au coeur du Royaume-Uni. Nous devons l’écouter, tenir compte des bonnes suggestions, mais en sachant que, sur ce sujet, il n’est pas du tout en position de force, ni en Europe ni chez lui.