Editoriaux d’Alain Lamassoure

 

Roses, rouges, verts : même combat?

La facilité avec laquelle socialistes, Verts et communistes plus ou moins repentis ont fusionné leurs listes au second tour des régionales ne s’explique pas seulement par le désir de garder des places. Elle illustre une convergence de fond, assez inquiétante pour notre pays.

La crise financière n’a pas eu que des conséquences économiques : le paysage idéologique, hérité de l’après-guerre, qui ne tenait plus que par un fil, a achevé de s’effondrer. Les mots « socialisme » et « libéralisme » n’ont plus de sens quand ceux qui continuent d’aduler Mao se livrent aux délices et aux poisons du capitalisme le plus échevelé, tandis qu’ailleurs des gouvernements libéraux ont dû prendre, fût-ce temporairement, le contrôle de leurs banques et de quelques grandes industries. Le combat politique a besoin d’un autre cadre de référence. Or, petit-à-petit, ce cadre se met en place. Les campagnes électorales de ces derniers mois, en Allemagne, de ces derniers jours en France, comme celles qui s’ouvrent au Royaume-Uni et aux Pays-Bas en donnent une première illustration. Le grand clivage est désormais : pour ou contre la croissance économique.

C’est le grand paradoxe européen, et un danger mortel pour notre continent. Depuis dix ans, l’Europe se traîne en lanterne rouge de la croissance mondiale, avançant péniblement de 1 à 1,5% par an tandis que l’Asie tourne à 10%, l’Amérique latine à 7 ou 8%, l’Afrique à plus de 5% et les Etats-Unis à plus de 2%. Maintenant que la crise est passée, chacun retrouve sa vitesse de croisière : les économistes s’accordent à estimer que la croissance potentielle de notre continent, entré faiblard dans la crise et sorti encore affaibli, ne dépassera pas 1,5% d’ici 2020. Et c’est à ce moment-là qu’une partie de l’opinion européenne s’effraie d’une « croissance ininterrompue qui va dans le mur » d’un « productivisme à tout crin » ou encore d’un « tout capitalisme qui a échoué ». Celui qui marche au pas ralentit l’allure parce qu’il s’effraie de voir ses concurrents courir !

C’est là que se rejoignent les orphelins de Karl Marx, dispersés entre-temps sur d’autres couleurs de l’arc-en-ciel. Privés de tout modèle économique alternatif, les communistes de tout acabit en viennent à dénigrer … l’économie elle-même : périsse l’économie qui, décidément, ne peut être que capitaliste ! Incapables, pour l’instant, de proposer une politique radicalement différente de celles que le pragmatisme a imposées un peu partout, les socialistes se concentrent sur le social, en feignant d’oublier que le financement du social n’est possible que dans une économie vigoureuse. Quant aux Verts, maintenant que les gouvernements européens ont fait de notre continent le plus respectueux des grands équilibres planétaires, ils ne trouvent plus leur identité que dans une surenchère fondamentaliste. C’est simple : ils sont contre tout. Contre la production végétale, qui exige trop d’eau et utilise trop de produits chimiques. Contre les OGM, qui pourtant épargnent l’eau et lesdits produits. Contre l’élevage, à cause des bouses de vache. Contre l’industrie, qui pollue par nature. Contre le tourisme, puisque les transports réchauffent la planète. Contre l’énergie nucléaire, bien sûr, mais aussi contre les microcentrales hydro-électriques, qui dérangent des espèces animales. Contre les biocarburants, rebaptisés « agrocarburants », qui affament les pauvres. Contre la voiture électrique … A la fin des fins, la seule politique qui a leur faveur, c’est le grand moins, seul moyen d’obtenir le « mieux ». Moins d’énergie, moins de transport, moins de consommation, moins de production, et même moins d’enfants pour une population mondiale mieux maîtrisée. C’est la décroissance.

Nous y voilà.

Idéologie redoutable, qui fait du repli sur soi, du refus du progrès scientifique et finalement de la paresse, des vertus cardinales puisqu’elles sauveraient, non pas l’âme des pratiquants, mais bel et bien la planète entière ! L’égoïsme frileux, érigé en générosité suprême ! Qui n’y souscrirait ? En même temps, on retrouve les échos de la campagne de François Mitterrand en 1981 : « travailler moins et gagner plus », au nom du « partage du travail ». Quand les socialistes choisissent comme leader l’ancien Ministre des 35 heures, les Verts font campagne pour les 32 heures, et toute la gauche française s’accorde pour la retraite à 60 ans, ignorant ce qui se passe même de l’autre côté de la Manche, du Rhin et des Pyrénées.

Conséquence logique des élections régionales : partout, les Verts ont obtenu le ralentissement ou le gel des grands travaux d’infrastructure, TGV, aéroports, comme l’arrêt des aides régionales au grand programme post-nucléaire ITER et aux nanotechnologies. Chacun est désormais prévenu : si la gauche veut s’unir en 2012, ce sera sur la base d’un programme de sous-croissance. Rendant tous nos problèmes définitivement insolubles : le chômage, le pouvoir d’achat, les inégalités, les retraites, l’endettement …

C’est pourquoi, au lieu de critiquer les Allemands pour leurs efforts et leur bonne gestion, la droite serait mieux inspirée d’inviter les Français à un grand sursaut national : tout, désormais, doit être subordonné à la maximisation de la croissance ! Pour connaître un développement « durable », encore faut-il qu’il y ait développement ! Pour faire du social, il faut d’abord trouver l’argent du social, et c’est la croissance qui le procure, pas l’appauvrissement collectif. Si l’on veut protéger la planète contre les excès de l’activité humaine, ce sera avec plus de progrès scientifique, et non en soumettant la science à l’idéologie verte.

Alain LAMASSOURE, le 23 mars 2010

Lettre d’Amérique

A la faveur d’un voyage familial pour les fêtes de fin d’année, j’ai retenu quelques impressions sur les divergences et les convergences d’état d’esprit des deux côtés de l’Atlantique.

Ni le réchauffement climatique, ni la menace de la grippe ne revêtent, aux Etats-Unis, le caractère obsessionnel qu’ils ont chez nous. En revanche, la préoccupation du moment est la qualité des repas dans les cantines scolaires : le Département de l’Agriculture s’est rendu compte que les normes d’hygiène des réseaux de fast food étaient bien plus strictes que les siennes. Michelle Obama a été obligée d’aller prendre son repas dans une cantine de Virginie pour rassurer les parents inquiets, tandis que le Congrès s’apprête à rendre obligatoire par la loi les normes de Mc Do. José Bové va-t-il aller détruire symboliquement une cantine de maternelle aux USA abhorrés ?

Contrairement à l’idée superficielle que l’on se fait volontiers chez nous du laxisme américain envers les banques, le New York Times s’est lancé dans une campagne féroce contre la puissante Goldman Sachs. Il a établi que la banque, qui a traversé sans dommage la crise financière et qui a fourni quelques uns de ses plus proches conseillers à Barack Obama, n’a pas hésité à spéculer contre … ses propres clients. En jouant à la baisse les valeurs qu’elle leur recommandait ! Décidément, les dirigeants européens ont raison de rappeler que le monde financier a besoin d’une moralisation qui dépasse largement le problème du niveau des bonus individuels des traders.

Jamais la criminalité n’a été aussi basse à New York : le niveau des homicides a été divisé par quatre depuis 1990, tombant en-dessous de celui d’il y a quarante ans. Ce résultat est d’autant plus impressionnant que, depuis 2001 le nombre de policiers locaux a été réduit de 6 000 et que tout le monde pensait que la crise économique aurait des effets criminogènes. Les résultats sont tout aussi satisfaisants à Los Angeles, San Francisco, Atlanta et Chicago, c’est-à-dire dans les autres villes les plus concernées par les vagues migratoires et les plus touchées par le crime organisé.

Même si la Chambre des Représentants et le Sénat ont adopté un texte assez différent, qu’il faut maintenant transformer en compromis acceptable par les deux assemblées, la réforme du système de santé voulue par Barack Obama est désormais en bonne voie. Elle laissera encore sur le bord du chemin plus de 10 millions d’Américains. Saluons le progrès par rapport à la situation actuelle, qui voit 45 millions d’entre eux échapper à une garantie d’assurance santé. Mais on regrettera pour nos amis d’outre-Atlantique qu’ils se soient contentés d’étudier les systèmes repoussoirs du Canada et de Grande-Bretagne, sans s’intéresser au modèle français qui est, en l’espèce, sans doute l’un des meilleurs du monde.

Sur les chemins de fer, là aussi, nous avons chacun à apprendre à l’autre. Nous pourrions nous inspirer du système américain de transport de marchandises, où le rail a su conserver une place considérable, alors que la SNCF est en faillite complète en la matière. En revanche, sur le trafic voyageurs entre grandes villes, faute de TGV la société Amtrak ne parvient toujours pas à honorer les engagements qu’elle avait pris il y a déjà trente ans de relier New York et Washington en 2 heures et demie, et en 2009 toutes ses lignes voyageurs ont perdu de l’argent.

Enfin, en politique, ce qui se passe en Amérique contient des enseignements intéressants pour nous aussi.

Une bonne nouvelle : après une campagne d’une grande qualité, les habitants de Houston, Texas, 4e ville des Etats-Unis, ont élu maire un ancien contrôleur de gestion de préférence à un ancien juge. Un choix compréhensible et, sans doute, raisonnable en ces temps de crise financière. L’élue est une homosexuelle avouée, son adversaire malheureux était un Noir : à aucun moment ces données personnelles n’ont été évoquées dans ce bastion des valeurs traditionnelles de l’Amérique.

Un avertissement : les dysfonctionnements finalement peu démocratiques auxquels aboutissent les excès de la démocratie directe. Le droit d’initiative populaire, permettant de soumettre directement au référendum des propositions ayant reçu un nombre suffisant de signatures de simples citoyens, existe dans deux douzaines d’Etats. Née d’abord dans le Dakota du Sud, puis fortement développée en Californie, cette pratique a permis de remédier à des cas de blocages politiques par manque de courage des gouvernants locaux. Mais, avec le temps, elle s’est pervertie. Les lobbies n’ont eu aucun mal à financer des campagnes démagogiques d’information ou de désinformation, pour faire décider des actions coûteuses, tandis que les associations de contribuables faisaient voter des baisses d’impôts ! Au bord de la faillite financière, la Californie ne peut plus augmenter ses recettes, la calamiteuse « proposition 13 » de 1978 exigeant une super-majorité de députés pour faire voter une augmentation fiscale. Plus grave encore : la formule tend à inciter une majorité à nier les droits des minorités qui lui déplaisent. La démocratie participative est une belle aspiration. Mais elle reste à inventer.

Alain LAMASSOURE, le 4 janvier 2010

Copenhague: retenir les bonnes leçons

Le résultat final du Sommet de Copenhague sur le climat ne doit pas être jugé par rapport aux attentes hyperboliques suscitées par l’enflure médiatique, mais à l’aune des leçons que l’on peut tirer désormais de cet exercice extrêmement révélateur. Des leçons nullement décourageantes, si on sait les comprendre.

1 – Un tel résultat – des déclarations politiques sans effet contraignant – était prévisible et, d’ailleurs, annoncé, y compris sur ce site. Les deux plus grands « pollueurs » de la planète (au sens de l’émission de CO²) avaient annoncé à l’avance qu’ils ne prendraient aucun engagement contraignant : les Etats-Unis, faute de soutien du Sénat, la Chine, faute de concession des Etats-Unis. Parmi les autres puissances émergentes, l’Inde n’a cessé de répéter qu’elle ne voulait rien faire du tout, et l’attitude du Brésil était d’une habileté ambiguë.

2 – Dans ce contexte, c’est l’honneur des pays européens d’avoir porté tout le processus à bout de bras. S’il y avait un Nobel de l’environnement, il devrait être attribué à l’Union européenne. Dès décembre 2008, elle ne s’était pas contentée de prendre des engagements politiques, elle a adopté un dispositif complet, juridique et financier, pour se contraindre à réduire ses émissions de 20% d’ici 2020, et cela quel que soit le résultat à attendre des négociations de Copenhague ! Depuis lors, ses dirigeants et ses diplomates n’ont cessé de presser leurs partenaires, allant jusqu’à proposer une aide financière considérable pour aider les pays les plus défavorisés. Parmi eux, une mention spéciale doit être attribuée au Président français : son obstination infatigable et son allergie à toute forme de découragement ont sauvé, non seulement la conférence elle-même, mais, au-delà, toute la démarche, qui n’aurait pas survécu au délitement d’un tel Sommet.

3 – L’échec s’explique par deux causes fondamentales, auxquelles on ne trouvera pas de remède rapide.

Sur le fond : l’évaluation des dangers et des causes du réchauffement climatique telle que nous l’acceptons en Europe n’est guère partagée au-delà. Pour les autres continents, les priorités ne sont pas les mêmes. La croissance, le développement, l’accession au rang de grande puissance, la sortie d’une pauvreté millénaire sont privilégiés par rapport à un danger considéré comme lointain, voire hypothétique. En France, Claude Allègre est diabolisé, mais disons, pour faire image dans ce débat si médiatique, que nous nous sommes trouvés être 500 millions de Nicolas Hulot face à 6 milliards de Claude Allègre. Ce qui nous amène à réaliser soudain que le groupement des scientifiques spécialisés dans le climat, le GIEC, a reçu, non le Nobel de physique, mais le prix Nobel de la Paix, et que celui-ci, en dépit de son ambition planétaire, est décerné par un jury exclusivement européen (et même exclusivement norvégien). Considérable à Stockholm ou à Paris, l’impact politique n’est pas le même à Pékin, à Delhi, ni à Lagos. Ni même à Houston, malgré Al Gore …

Sur la méthode. Et là, les Européens devraient être les moins surpris de tous. Il nous a fallu un demi-siècle, entre Européens, pour nous affranchir du carcan de l’obligation de l’unanimité requise pour la moindre décision à prendre ensemble. Ce n’est que depuis le 1er décembre dernier que nous en sommes délivrés grâce à l’application du traité de Lisbonne. Quelques jours plus tard, voilà 189 pays réunis à Copenhague, à qui on demandait de soumettre leurs producteurs et leurs consommateurs à des contraintes techniques et financières draconiennes, dans un système politique embryonnaire, resté esclave de l’unanimité. La voilà, la « mondialisation », sous son aspect politique !Pendant la guerre froide, l’accord entre Washington et Moscou valait décision mondiale, chacun des deux « super-grands » assurant la discipline de son camp. Dans les années 90 encore, l’accord entre Américains et Européens permettait de créer l’Organisation mondiale du Commerce, le reste du monde acceptant de suivre. Cette période est révolue : les pays émergents prennent la parole, occupent leur rang et, derrière eux, s’engouffrent des puissances moyennes ou petites qui entendent aussi faire respecter leur souveraineté nationale. Il a fallu la pression d’une urgence extrême et le sentiment d’un sort partagé pour que le G20 parvienne à une réponse concertée face à la crise financière. Mais, au-delà, les règles du jeu mondial du XXIe siècle restent entièrement à inventer. Pour l’environnement, comme pour le commerce : c’est pour la même raison que le processus de Doha est encalminé depuis des années. Comme pour les accords de désarmement.

4 – Le désarmement, précisément, et notamment la maîtrise de la prolifération nucléaire. C’est le prochain grand rendez-vous international, prévu pour 2010 : la mise à jour d’un traité datant de 1968, contourné, ignoré ou délibérément violé depuis par une demi-douzaine d’Etats. Comment éviter que des pays émergents ne remettent en cause la légitimité d’un texte signé il y a quarante ans dans le contexte de la guerre froide et sous le parrainage de ses seuls acteurs ? Comment réunir un consensus quasi mondial – à l’exception des « Etats voyoux » – qui exigera des garanties de sécurité pour chacun, et une forme d’égalité de traitement entre Etats « nucléaires » et « non nucléaires », entre grands et petits, entre « riches » et « pauvres » ? Or, nous sommes ici en face d’un risque beaucoup plus immédiat que celui du réchauffement climatique et qui, lui, ne dépend que de la décision humaine. La leçon de Copenhague est qu’il faut d’abord s’entendre sur la source de légitimité, et sur la méthode de négociation. Cela prendra du temps, mais ne peut-on commencer par s’accorder sur un gel des programmes d’armement de tous les Etats participants ?

5 – Au-delà des risques militaires, il est temps que l’Union européenne se recentre sur la première urgence et la première exigence : la relance durable d’une économie menacée de sous-développement durable. Déjà, avant la crise, notre croissance se traînait sous les 2%, là où les Etats-Unis faisaient moitié mieux, l’Afrique deux fois plus, l’Amérique latine trois fois, l’Inde quatre fois, tandis que la Chine tournait avec un taux à deux chiffres. Aujourd’hui, tous les économistes s’accordent pour estimer que la croissance dite « potentielle » (moyenne atteignable hors temps de crise) de l’ensemble de la zone euro ne dépassera pas 1,5% d’ici à 2020 ! Un et demi pour cent ! Si tel est le cas, aucun de nos problèmes n’est soluble : ni le chômage, ni les inégalités, ni la réforme de l’éducation, ni le financement des retraites, ni le remboursement de la dette alors que nous partons d’un déficit du budget de l’Etat égal à six mois de dépenses ! C’est pourquoi le programme « Europe 2020 » que prépare la nouvelle Commission européenne doit se donner comme objectif absolu, voire exclusif, le doublement de notre croissance potentielle. Et nos dirigeants doivent maintenant déployer à cette grande œuvre l’énergie inépuisable qu’ils ont consacrée depuis un an, à juste titre, aux grandes causes mondiales.

6 – Cela ne signifie pas qu’il faille baisser les bras sur le dossier énergétique et climatique. Même décevantes, les conclusions de Copenhague ont le mérite de prévoir un calendrier de suivi. Le traité de Lisbonne donne à l’Union européenne la compétence, qui lui manquait, pour concevoir et conduire une politique énergétique commune. Si un accord unanime, global et exhaustif semble hors de portée, des progrès appréciables sont possibles dans plusieurs directions :

Sur le prix des hydrocarbures. A supposer que la raréfaction inéluctable des gisements tarde à produire ses effets, il est possible, soit de négocier le maintien d’un prix élevé avec les pays producteurs (l’OPEP, ainsi que l’organisation gazière en gestation), soit d’assurer celui-ci par l’impôt – qu’on l’appelle IRPP ou taxe carbone. Rappelons au passage que, contrairement au discours dont l’opinion s’est laissée bercer jusqu’à une date très récente, lutter contre le changement climatique coûtera cher au consommateur ou/et au contribuable.

Sur la neutralisation des émissions des centrales à charbon, de loin les plus nocives. A elle seule, la Chine inaugure, en moyenne, une nouvelle centrale au charbon chaque semaine ! Le plan de relance européen comporte le financement de plusieurs installations pilotes de capture et d’enfouissement du CO² – dont une en France, à Florange. Ce sont évidemment des recherches à accélérer.

Sur l’arrêt de la déforestation. Le Brésil est ici en première ligne, et plusieurs pays africains et asiatiques peuvent participer à un accord international intelligent sur le sujet.

Enfin, sur l’aide aux pays en développement. Une révision déchirante qu’il est grand temps de faire : à quoi servent les dizaines de milliards d’euros et de dollars donnés aux pays « les moins avancés » s’ils n’aident, ni au développement économique, ni à la démocratisation (rebaptisée pudiquement « bonne gouvernance »), ni à la sécurité alimentaire (moins de 5% de l’aide à l’Afrique !), ni à la préservation de l’environnement ? La crise économique a laissé nos budgets nationaux dans un tel état que nous ne pouvons plus nous permettre de soigner à grands frais notre mauvaise conscience du passé sans mettre au premier plan l’intérêt des peuples concernés. Voilà un autre grand sujet qui mérite un effort de créativité dans la manière de l’aborder au niveau planétaire, à un moment où la Chine, l’Inde, la Corée du Sud et plusieurs pays pétroliers viennent prendre le relais des anciens pays colonisateurs, certes pour aider ces pays, mais aussi pour contrôler leurs ressources naturelles et, parfois, pour acheter leurs terres fertiles.

Décidément, il y a beaucoup de fruits à cueillir, après le soi-disant échec de Copenhague…

Alain LAMASSOURE, le 23 décembre 2009

A propos de l’identité nationale

L’expérience m’a appris à me méfier de l’introspection collective autant que de l’introspection personnelle : se regarder le nombril, c’est toujours un repli sur soi-même. Chacun de nous est une somme d’appartenances, plus une individualité unique, par son code génétique comme par son expérience d’homme, par l’inné et par l’acquis.

Le plus grand bouleversement que la construction européenne ait apporté à l’identité nationale est aussi le plus méconnu : c’est le passage inouï, en deux générations, de l’état de guerre récurrente entre ennemis héréditaires à la paix perpétuelle entre voisins appartenant désormais à une même famille. La nation assurée de la paix ne peut plus avoir le même contenu, la même fascination, la même exigence que la nation perpétuellement menacée de la guerre. Ce n’est plus Marianne, pour qui on était prêt à donner sa vie, c’est une administration anonyme, dont on n’espère plus rien de grand, mais un peu de tout dans la vie quotidienne. Cette nation-là ne peut plus attendre de ses « enfants » le quasi-monopole d’appartenance, les libérant ainsi pour s’épanouir dans d’autres affinités : l’attachement à la région, bien sûr, mais aussi à sa tribu familiale ou sociale, à sa religion ou sa spiritualité, à son métier, à un club sportif, à la communauté des internautes, à l’Europe, voire à la solidarité planétaire …

On comprend qu’un changement aussi rapide puisse donner le vertige. On court alors deux risques : ranimer l’esprit national par l’intolérance envers les autres identités, ou remplacer un nationalisme par un autre. Piètre progrès que serait un nationalisme européen se substituant au nationalisme français ! Au contraire, l’Europe, c’est la nation libre et épanouie, délivrée du nationalisme.

La clé de la délivrance, c’est de prendre le contre-pied de la formule du Sartre de Huis Clos. Non, l’enfer, ce n’est pas les autres, tout au contraire : le salut de chacun est dans les autres, dans notre action avec les autres et pour les autres, dans notre solidarité familiale, sociale, nationale, européenne, planétaire, dans ce que le christianisme originel appelait la charité. L’identité est dans le faire, bien plus que dans l’être. « Au commencement était l’action »

Au fond, notre meilleur guide reste Montesquieu.

« Si je savais quelque chose qui me fût utile, et qui fût préjudiciable à ma famille, je la rejetterais de mon esprit. Si je savais quelque chose qui fût utile à ma famille, et qui ne le fût pas à ma patrie, je chercherais à l’oublier. Si je savais quelque chose qui fût utile à ma patrie, et qui fût préjudiciable à l’Europe, ou bien qui fût utile à l’Europe et préjudiciable au genre humain, je la regarderais comme un crime. »

Alain LAMASSOURE, le 11 novembre 2009

Getting all the parliaments of Europe to work together

The formal involvement of the national parliaments in the political decisions of the European Union is one of the main keys to the success of the Lisbon Treaty.

It increases the powers that the EU shares with the Member States, while extending the legislative power of the European Parliament to cover all legal instruments and Community budget expenditure. This means that an increasing number of political decisions will be taken in Brussels and that the European Parliament will have greater involvement in the decision-making process, while the national parliaments will continue to play a vital role in mobilising the budgetary resources and any additional – and sometimes essential – legal means that are necessary for the success of a joint European measure. Take the example of the ‘Lisbon Strategy’ which aimed to make the European Union the most competitive economy in the world in just 10 years: it failed mainly because of the persistent disconnection between the European political debate, which defined the objective, and the debate in the Member States, on which 80% of the resources depended.

Hence the major advantage of systematically coordinating the work of the European Parliament, which has a continent-wide overview, and the national parliaments, which are perceived by the general public (and some high courts such as the German Constitutional Court) as more legitimate.

Admittedly, the new Treaty does give the national parliaments the power to censure a priori any Community projects that might infringe the principle of subsidiarity (known as the ‘early warning’ system), but this development confines them to a purely negative role. We must go much further, and it is perfectly possible to do so under the current Treaties.

An interparliamentary agreement, comparable, mutatis mutandis, to the interinstitutional agreements concluded between the EU institutions, could form the basis for such cooperation between all the parliaments of Europe: this would be a ‘contract’ that would have no binding legal effect but would involve a strong political constraint. Such an agreement could include the following undertakings:

1. Organisation of a system of mutual information and exchange of views in order to implement the ‘early warning’ mechanism.

2. Reciprocal commitments on EU legislation: before the European Parliament adopts a directive, it will inform its national counterparts, which may deliver an opinion if they so wish and as they so choose; conversely, the transposition of directives into national law will involve, for example, a hearing of the European Parliament’s rapporteur in order to determine the intention of the Community legislature.

3. A commitment by the European Parliament to consider any joint proposal submitted by the parliaments of a significant number of Member States; the parliaments must have the same power to make legislative proposals as that given to the people through the citizens’ right of initiative. Such a commitment would have even greater value if the Commission could subscribe to it, thereby speeding up the review process.

4. A joint debate held every spring on the budget guidelines for the following year. To engage the interest of the national media and, through them, the general public, it would be better if people participated from their own countries using video-conferencing. This would require all the Member States to use the same basic economic assumptions for the years N and N+1 and would mean that each parliament would naturally draw up and publish a list of all the national budget headings that help fund common European objectives or common policies. Such an event, which would take place before the parties involved are officially consulted about the future financial perspectives and the reform of the EU’s own resources, would be highly educational.

5. A joint debate held every year on the state of the Union, based on a statement by the President of the European Council, the President of the European Commission and the EU High Representative for Foreign Affairs and Security Policy. Unlike the previous proposal, this event would be more significant and attract more interest if all the parliaments’ political ‘heavyweights’ met in one place.

6. Launch of joint investigations on the effective application of Community law throughout the European Union.

7. Coordination of the sending of observers to monitor elections in sensitive third countries.

With regard to timing, this initiative would benefit from being launched in the first half of 2010, in close cooperation with the Spanish Presidency, so that initial feasibility tests might be carried out before reaching a formal agreement under the Belgian Presidency during the second half of the year and subsequently applying it on a full-year basis in 2011.

Alain Lamassoure, 30 October 2009

Proposition de loi créant une taxe carbone

Considérant qu’en adoptant le plan européen « énergie/climat » et les lois « Grenelle de l’environnement », la France s’est engagée à réduire les émissions de gaz à effet de serre de 20% d’ici 2020 ;

Considérant que le renchérissement du prix des énergies carbonées est le meilleur moyen d’en réduire la consommation, ce qui justifie le recours à une « taxe carbone » spécifique ;

Considérant qu’une telle taxe ne peut avoir d’effet dissuasif que si elle s’applique de manière universelle à tous les consommateurs d’énergies carbonées, les gaz émis ayant le même effet polluant quel que soit le niveau de vie, l’activité professionnelle ou le statut juridique de l’émetteur ;

Considérant que la création d’un impôt nouveau dont l’intégralité du rendement serait reversée à certains contribuables engendrerait des dépenses de gestion impossibles à justifier lorsque le déficit budgétaire atteint 50% des dépenses de l’Etat ;

Considérant que les taux voisins de 20 euros la tonne de carbone, envisagés par la commission d’experts mandatée par le gouvernement, n’auraient en toute hypothèse qu’un effet dissuasif limité ;

Considérant que la taxe intérieure sur les produits pétroliers (T.I.P.P.) correspond, à son niveau actuel, à un prix implicite du carbone, treize fois plus élevé, de 260 euros la tonne, que son revenu profite entièrement au Trésor public, et que son éventuelle augmentation n’entraînerait aucun coût de gestion supplémentaire ;

Article unique

A compter du 1er janvier 2010, la taxe intérieure sur les produits pétroliers portera le nom de « taxe carbone ».

Alain LAMASSOURE, le 14 octobre 2009

A new European Treaty: what for?

For 10 years now, most of the European leaders’ time and energy has been taken up with the negotiations for the enlargement of the European Union and successive attempts to adapt our common home to this growing population. Now that the Lisbon Treaty has been ratified and the ‘big bang’ enlargement is complete, we can finally get back to basics: the substance of EU policies.

However, during this ‘lost decade’, the rest of the world has not stood still: we have seen the spectacular emergence of China and other former Third-World powers, the phenomenal spread of all communication technologies right to the heart of Africa, chain reactions caused by Islamist terrorism, oil, financial and economic crises and an awareness of the global nature of threats such as climate change and nuclear proliferation.

To make up for lost time, the Union must take advantage of its new resources and adopt a new 10-year programme. Let’s be bold in our ambitions: it is up to us to design a Europe for the 21st century.

Yes, there is a ‘European model’. It is much more than a social market economy model. It is the art of living together in peace, both within and beyond our borders, respecting human rights and national identities, and recognising the need for sustainable development. We must complete it together and promote it globally.

1. As a first step, a tremendous survival instinct is needed in order to help Europe reverse the gradual downward demographic and economic trends that the financial crisis has merely sent spiralling even deeper. Europe’s working population is starting to decline, while the world’s population is set to increase by 50%. Economists tell us that the growth potential of the European Union barely exceeds 1.5%, whereas emerging countries are expecting close to double digit growth rates. It is high time we woke up! However welcome they may be, mantras about sustainable development must not lead us to resign ourselves to sustainable underdevelopment. Let’s set ourselves an average target growth rate of 3%, a fertility rate above 2% (the rate has now risen back to this level in France) and, once the economic crisis has been overcome, a balance of public finances that will allow us to finance our health spending and our pensions without transferring the burden to future generations. Let’s also provide the Union itself with the own resources it needs to finance common policies: the Lisbon Treaty has given it the legal wherewithal, but not the corresponding budgetary resources.

2. Let’s reinvent the single area. The term ‘internal market’ also implies European public goods: civil peace and security, transport and energy networks, social rights and cultural diversity must be recognised and treated as such.

Furthermore, the European area is more than just a market: it is a living space. Ten million Europeans now live in an EU country other than their country of origin, and, each year, hundreds of thousands of children are born of marriages between partners of different nationalities. For a Danish woman to be able to marry a Portuguese man in Ireland and then have children in Belgium before working in Austria, getting divorced in Sweden, retiring in Greece and bequeathing all her worldly goods to her Polish grandchildren, all manner of issues need to be addressed in order to provide an improved living environment for Europe’s citizens.

This also calls for Europe to become a common political space. We have broken down all barriers between us, except for the glass walls surrounding our political debates. Each country remains obsessed with navel-gazing, its focus on issues of national politics (oh, the irresistible fascination of election time in Paris, London, Berlin or Madrid!), while ‘Brussels’ operates as a 28th country, just as unknown to the 27 and equally self-absorbed. Let’s break through these invisible walls! Let’s establish links between our national parliaments, take advantage of the citizens’ right of petition and call on the ‘Lisbon triumvirate’ to address issues of common interest.

3. As Europe emerges from its torpor, it will find itself in a world that has become multipolar without it. At the same time, in order to build a culture of peace, this world needs the benefit of Europe’s unique experience. If only the whole of Europe would unite and always speak with one voice, whether it be at the IMF, the ILO or the WTO, at negotiations on climate change or conferences on disarmament, or even at the UN or the G20! If only Europe knew what to do with its strong currency in dealing with the aftermath of the crisis that is going to cause such an upheaval for the euro, the dollar, the yen and the yuan! If only it would propose the establishment of a joint organisation to exchange experiences with other regional unions that are gradually taking shape on every continent – Mercosur, ASEAN, the African Union, the Arab Maghreb Union, the Gulf Cooperation Council and so on! If only Europe would finally agree to assume responsibility for its external security!

Shall we?

Alain Lamassoure, 12 October 2009

Un nouveau Traité européen, pour quoi faire?

Pendant dix ans l’essentiel de l’énergie et du temps des dirigeants européens a été accaparé par les négociations d’élargissement de l’Union européenne et les tentatives successives d’adaptation de la maison commune à ce nombre croissant d’habitants. Une fois acquis le traité de Lisbonne et achevé le « grand élargissement », nous allons enfin pouvoir revenir à l’essentiel : le contenu des politiques européennes.

Or, pendant cette « décennie perdue », le reste du monde n’est pas resté immobile : émergence spectaculaire de la Chine et des autres puissances de l’ancien Tiers Monde, diffusion prodigieuse de toutes les techniques de communication jusqu’au cœur de l’Afrique, réactions en chaîne provoquées par le terrorisme islamiste, crises pétrolière, financière, économique, prise de conscience du caractère planétaire des menaces telles que les changements climatiques ou la prolifération nucléaire.

Pour rattraper le temps perdu, en mettant à profit ses moyens nouveaux, l’Union doit se doter d’un nouveau programme décennal. Ne mégottons pas sur l’ambition : l’Europe du XXIe siècle est à inventer.

Oui, il y a un « modèle européen ». C’est bien plus qu’un modèle d’économie sociale de marché. C’est un art de vivre ensemble dans la paix, intérieure et extérieure, en respectant les droits humains, les identités nationales, et l’exigence du développement durable. Il nous faut le parachever entre nous, et le valoriser à l’échelle mondiale.

1 – Cela suppose d’abord un formidable réflexe de survie, pour sortir l’Europe du lent naufrage démographique et économique, que la crise financière n’a fait qu’accélérer. La population active européenne commence à diminuer, alors que la population mondiale va s’accroître de moitié. Les économistes nous disent que la croissance potentielle de l’Union ne dépassera guère plus que 1,5%, quand les pays émergents repartent vers des croissances proches des deux chiffres. Réveillons-nous ! Aussi bienvenues qu’elles soient, les incantations en faveur du développement durable ne doivent pas aboutir à nous résigner au sous-développement durable. Fixons-nous un objectif moyen de croissance de 3%, un taux de fécondité supérieur à 2% (celui qu’a retrouvé la France), et, une fois surmontée la crise économique, un solde de finances publiques nous permettant de financer nos dépenses de santé et nos retraites sans reporter la charge sur les générations suivantes. Et dotons l’Union elle-même des ressources propres dont elle a besoin pour financer les politiques communes : le traité de Lisbonne lui a donné les moyens juridiques, mais pas les ressources budgétaires correspondantes.

2 – Réinventons l’espace unique. Qui dit marché intérieur doit dire aussi biens publics européens: la paix civile et la sécurité, les réseaux de transport et d’énergie, les droits sociaux, la diversité culturelle doivent être reconnus et traités comme tels.

Et l’espace européen ne se réduit pas à un marché : c’est un espace de vie. Dix millions d’Européens vivent désormais dans un pays de l’Union différent de leur pays d’origine ; chaque année plusieurs centaines de milliers d’enfants naissent de mariages binationaux. Permettre à une Danoise d’épouser un Portugais en Irlande, pour enfanter en Belgique, avant de travailler en Autriche, divorcer en Suède, prendre sa retraite en Grèce et léguer ses biens à ses petits-enfants polonais : tout est à faire pour aménager l’Europe comme un espace de vie personnelle.

Cela suppose aussi qu’elle devienne un espace politique commun. Nous avons fait tomber toutes les cloisons entre nous, sauf les parois de verre de nos débats politiques. Chaque pays reste concentré sur le nombril de son débat politique national (ah, la fascination irrésistible de la course à l’Elysée, au 10 Downing Street, à la Chancellerie, à la Moncloa … !), et « Bruxelles » fonctionne comme un 28e pays, tout aussi méconnu des 27 et tout aussi nombriliste. Brisons ces murs invisibles ! Branchons nos Parlements les uns sur les autres, mettons à profit le droit de pétition collective, interpellons le « triumvirat de Lisbonne » sur les sujets d’intérêt commun.

3 – Sortant de sa torpeur, l’Europe va découvrir qu’elle se retrouve dans un monde devenu multipolaire sans elle. En même temps, pour s’organiser dans la paix, ce monde a besoin de l’expérience irremplaçable de l’Europe. Qu’elle s’organise elle-même pour parler partout d’une seule voix : au FMI ou à l’OIT comme à l’OMC, aux négociations sur le climat comme aux conférences sur le désarmement, et même à l’ONU et au G20 ! Qu’elle sache quoi faire de sa monnaie si solide, face aux lendemains de crise qui vont bouleverser les cartes entre l’euro, le dollar, le yen et le yuan ! Qu’elle propose une organisation commune, pour un échange d’expériences, aux autres unions régionales qui s’ébauchent peu à peu sur tous les continents – Mercosur, Asean, Union africaine, Union du Maghreb arabe, Conseil de coopération du Golfe … ! Qu’elle se décide enfin à prendre en charge la responsabilité de sa sécurité extérieure !

On y va ?

Alain LAMASSOURE, le 12 octobre 2009

What does the Lisbon Treaty change?

The European Union, an unfinished, hybrid organisation that was designed 50 years ago for a different world, is finally moving into the political arena, towards democratic legitimacy and the 21st century.

It will now have its own leaders. Up to now, the Union has been directed jointly by the Heads of State or Government meeting at a summit for up to two days around every two months. Each Head of State or Government is, of course, elected democratically in his own country, but he is elected only by his own people, and he is accountable only to them for the way in which he defends national interests in Europe or even against Europe. In addition, with the Presidency of the European Council rotating every six months, it was impossible to have any political continuity: after the action-packed six-month Presidency led by the French President a year ago, his Czech successor spent most of his time trying to bring down his own government before the Swedish Presidency could pick up where France had left off. That now belongs in the past: the European Council will now have a full-time President for a term of up to five years. The face of the EU on the world stage will be a new High Representative at the head of his (or her) own diplomatic network of some 5 000 staff.

The people will be able to influence European policy directly. The notorious ‘democratic deficit’, the indifference of the mainstream media and the startlingly low turnout in European elections will be a thing of the past! The European Parliament will have full legislative power, and it is the people rather than the governments who will elect the future head of the EU executive body, the President of the Commission, just as they might elect their mayor, or, in some EU countries, their Prime Minister, at the head of the list – in this instance, through the election of the European Parliament in Strasbourg. When the time comes to appoint a successor to José Manuel Barroso, the major European political families will be asked both to propose a genuine legislative programme – something that they have never done before – and to put forward the name of their candidate for President of the EU ‘government’. Major television channels will jostle to organise a face-to-face debate between the two main candidates, just as they do during French or US presidential elections. Europe will not be an easy and anonymous scapegoat any more: it will have a face, a person who is directly responsible to the people.

Not only that. The people’s new powers will enable them to launch their own political initiatives: a petition with at least one million signatures from a number of Member States will require European leaders to address an issue or project, to discuss it and to adopt a position on it publicly. Political parties, trade unions, associations, students, cross-border workers, expatriates, management and workers in multinational companies, couples or children with parents of different nationalities and so on will have a very new and very effective way of keeping ‘participatory democracy’ alive across the whole continent.

Europe is expanding its remit to cover areas where the Member States need to act together for the sake of efficiency. This includes all of our external trade, financial, economic, technical, scientific and environmental relations. Energy, which was where it all began back in 1951 (with the European Coal and Steel Treaty) and where it all fell apart during the oil shocks of the 1970s, is another key area: the EU will finally be able to take strong and concerted action in response to Russia’s strong-arm tactics over its gas supplies and in order to meet the historic objective for ‘low-carbon’ energy use. It may also have a genuine space policy.

With regard to the key areas of foreign policy and defence, the basic powers and responsibilities remain in the hands of the Member States, but they undertake to coordinate their positions under the leadership of the European High Representative. In military matters, countries that agree to pool their resources may do so without having to wait for the others. Of course, there is not going to be a single European diplomatic line overnight, and the President of the United States is not going to have a single negotiating partner on this side of the Atlantic just yet. However, just as they have started to do with regard to the serious crisis in Iran, the leaders of the larger countries will find it easier to reach a consensus, and they will then have a civilian and military tool to help them turn their words into deeds.

Of course, the quality of the music will depend on the talent of the composers and the musicians. The instrument still had to be invented. That has now been done. People of Europe, let’s get to work!

Alain Lamassoure, 3 October 2009