Brexit: le départ du Royaume-Uni doit servir à l’Europe d’électrochoc salutaire

L’Union européenne est une famille de peuples libres. Libres d’y vivre libres. Libres de la quitter.

Pour la France, premier des pays fondateurs, depuis le premier jour, la construction européenne est un projet politique. Nos amis anglais ont accepté le grand marché, mais ils ne se sont jamais sentis à l’aise avec le projet. 

Aujourd’hui, ils ont choisi de quitter la famille. Pour tous ceux qui aiment le Royaume-Uni, qui gardent au cœur l’héroïsme et les sacrifices de son peuple quand il s’est agi de défendre notre propre liberté, c’est un douloureux déchirement. Souhaitons qu’à l’échelle de l’histoire, cela ne soit qu’une parenthèse. Mais nous devons prendre acte de la volonté exprimée souverainement par le peuple britannique. Ce n’est pas un adieu, mais c’est un vrai au revoir.

Amis anglais, puisque vous l’avez voulu ainsi, l’aventure européenne continuera sans vous. Vous avez décidé d’affronter seuls les défis du XXIe siècle. Ce choix n’est pas le nôtre. Plus que jamais, les dangers et les opportunités de notre temps nous commandent d’agir ensemble. J’ajoute que, face à la renaissance inquiétante des populismes, face à la banalisation des discours de haine, des deux côtés de l’Atlantique, jamais nous n’avons eu plus besoin de l’expérience acquise ensemble pour préserver le miracle de la réconciliation entre nos peuples : les nations libérées du nationalisme. C’est le cri du cœur bouleversant du mari de la malheureuse Jo Cox : « Unissons-nous contre la haine : »

Survenant après d’autres crises, le départ du Royaume-Uni doit servir à l’Europe d’électrochoc salutaire. Il y a eu trop de ratés, trop de temps perdu, trop de résultats décevants après trop d’enflure dans les annonces. Le moment est venu de poser la question de confiance entre Européens sur ce que nous attendons de la vie commune. Quels sont ceux qui se satisfont de l’Europe réduite à un grand marché ? Quels sont ceux qui sont désireux d’engager enfin une vraie Europe politique, dans les domaines où elle est nécessaire, et seulement dans ceux-là ? 

Cette question, chacun doit la poser chez lui avant que nous en parlions ensemble. En France, comme en Allemagne, l’élection nationale de l’an prochain sera l’occasion de faire trancher le souverain, c’est-à-dire le peuple. Un nouvel élan ne pourra venir que d’une initiative commune de nos deux pays, avec tous ceux qui veulent bâtir l’Europe de ce siècle.

Encore faut-il que la France soit à nouveau dirigée d’une main ferme, et qu’elle soit remise en ordre de marche. Les Français ne se reconnaissent plus dans cette Europe, dont leurs dirigeants ont abandonné la cabine de pilotage. L’Europe ne reconnaît plus la France, qui savait inspirer et rassurer en donnant l’exemple chez elle. Nous portons sur nos épaules bien plus que l’avenir de notre pays : une grande part de celui du continent, et du maintien de ses valeurs à l’échelle du monde.

 

                                                                                                     Alain LAMASSOURE